CONFIDENCES – MA VIE AUPRÈS D’ANDRÉ MOREAU

La bénédiction, je n’y croyais pas trop. Non seulement je ne pensais pas qu’une telle activité puisse m’être réellement bénéfique, mais je la soupçonnais même de représenter une offense envers Dieu, une sorte de sacrilège à son endroit, une permission que je m’accorderais à mes risques et périls. S’il était encore d’actualité dans la tradition québécoise que nos pères aient le droit de bénir leurs enfants au nom de Jésus-Christ le Jour de L’An, il ne m’était jamais venu en tête que moi aussi – une femme ! – je puisse bénir pour quelque raison que ce soit.

Naturellement, je croyais à cette époque à un Dieu transcendant qui avait droit de vie ou de mort sur mon existence, devant lequel je devais m’agenouiller et me faire toute petite pour ne pas l’offenser. D’ailleurs, cette dévotion obligée était assortie d’un cortège de malédictions, car l’homme étant pécheur, le bras tout-puissant d’un Dieu vengeur pouvait s’abattre sur lui à tout moment. Si je me savais être une ‘’infime partie de Dieu’’, comme ma religion me l’avait enseigné sans me souligner qu’une infime partie de l’Infini ne pouvait être que l’Infini lui-même! -, j’ignorais à ce moment-là que Dieu n’existe réellement que pour celui qui le laisse grandir en lui par un acte volontairement conscient.

M’agrandir du dedans, repousser mes limites, faire place à l’impossible, au fantastique, à l’incommensurable; laisser croître mon être tout-puissant, aussi intime et chaleureux que profond et immuable (cet être plus moi-même que moi-même) afin qu’il en arrive à prendre de plus en plus de place au sein de ma personne fragile et vulnérable, voilà bien pourtant ce qui pouvait enfin donner un sens à ma vie et lui donner toute sa valeur ! Constamment aux prises avec mes limites, au lieu de prier à genoux et d’implorer de l’aide, en bénissant j’en vins graduellement à pouvoir agir directement sur les circonstances aliénantes qui se présentaient à moi, tout en reconnaissant que c’est moi qui les avais produites.

C’est André Moreau qui m’a appris à bénir. Mais comme il l’a souvent répété au cours de ses conférences, les bénédictions d’un poulet ne valent pas grand-chose. Aussi la question est-elle de savoir : Qui bénit ? Et comment bénir ? Il répondait à cela : « Il importe de bénir au nom de son être profond, éternel et ineffable, en lui accordant une confiance sans bornes, sachant qu’on ne reçoit pas toujours le bien qu’on souhaitait, mais souvent le mieux qu’on n’attendait pas. Plus nous bénissons, plus notre confiance s’accroît et plus les résultats sont concluants. »

Alors… j’ai commencé à bénir des petites choses de la vie courante pour vérifier si la formule était valable. Voulant me rendre par exemple à un point précis du centre-ville, au beau milieu de la circulation intense, je bénissais avant de partir de chez moi une place de stationnement vacante devant l’entrée de l’édifice où je souhaitais me garer.  À un coin de rue de là, tandis que je ne voyais encore aucune place de libre, voilà que la voiture qui se trouvait justement en face de l’édifice sortait de son espace pour s’en aller, ce qui me permettait aussitôt de me garer ! Même chose pour la pluie : comme il ne me plaisait pas de sortir de ma voiture sous le déluge alors que j’arrivais quelque part, je bénissais ma sortie ‘’ au sec ‘’, et six ou sept fois sur dix la pluie cessait de tomber quelques secondes avant que je quitte mon véhicule. Ma foi en les bénédictions commençait drôlement à se confirmer !

J’ai entrepris alors de bénir mon corps pour qu’il reste jeune, du moins qu’il ne vieillisse pas prématurément, puis ma santé physique et mentale pour que je puisse continuer à faire ce qui me tient à cœur, mon harmonie, ma sécurité, mon bonheur, ma joie de vivre, mon intelligence, ma mémoire, ma concentration, mon petit chien, André et mes compagnons, mes parents, ma famille et tous ceux que j’aime, bref ce que je souhaitais voir protégé par une force êtrique.

Il me restait maintenant à ouvrir grandes les portes de ma conscience pour étendre mes bénédictions à des climats, à des champs de force, à des pays, à l’univers. En arriver à  bénir constamment n’a pas nécessité de ma part d’efforts particuliers, puisqu’une fois qu’on entre dans ce genre de vibrations harmoniques, notre vie toute entière devient une bénédiction.

Alors que la plupart des gens vont accorder beaucoup de temps à la méditation et vont se précipiter dans des ashrams afin de suivre des cours avancés très coûteux pour pouvoir apprendre à méditer, André disait : « Pourquoi apprendre à méditer ? On n’apprend pas à respirer, et ça vient tout seul. Les adeptes qui s’engagent dans cette voie pensent qu’il faut méditer vingt minutes le matin et le soir. C’est totalement ridicule. On ne respire pas seulement le matin et le soir, c’est une fonction naturelle. »

Je comprenais ici son point de vue qui était opposé aux rituels, aux exercices spirituels, aux jeûnes ou à des pratiques pour canaliser l’énergie. André bénissait, comme les saints dont on nous raconte qu’ils se répandaient en alléluias. Il y avait dans sa vie un mouvement spontané qui consistait à rendre grâce pour toutes choses. Ça ne s’adressait pas à un Dieu quelconque; c’était un élan spontané de son cœur. Il n’a jamais soutenu l’idée qu’il y avait un Dieu créateur auquel il fallait rendre des comptes. Il disait même que si le Bon Pasteur voulait son troupeau beau et gras, c’était pour en avoir un meilleur prix à l’abattoir.

Le mouvement de rendre grâce consiste à bénir souvent pour rien, car il y a une sorte de gratuité dans la bénédiction. C’est comme une oxygénation de la personne qui parvient à un niveau de respiration supérieure en écoutant son être. C’est pourquoi, j’ai vite compris que la bénédiction consistait en un investissement êtrique, car rien autour de nous n’a de sens et ne subsiste par soi. La bénédiction consiste à accorder avec bienveillance un supplément d’être à tout ce qui existe.

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