Certains se disent oui, osent sortir des sentiers battus et plonger dans l’inconnu en toute confiance, d’autres disent non. Non aux changements qui leur seraient bénéfiques, non aux plaisirs suaves, à l’érotisme, à une sexualité libre et épanouie par crainte des virus ou qu’en dira-t-on ; non à leur belle folie créatrice qui les libérerait de leurs angoisses, à l’excès qui les sauverait de la normalité et de l’ennui dont ils sont prisonniers ; non à leur intuition, à leur imagination, à l’écoute de leurs rêves, de leurs aspirations et de leurs désirs par manque d’inattention à ce qu’ils ont de plus intime, ou encore non à l’audace qui les familiariserait avec la part la plus vaste d’eux-mêmes.

Quand nous disons non au monde, le monde nous dit non ! Lorsque nous nous fermons à quelqu’un et lui prêtons des sentiments mauvais, ce dernier s’applique à être fidèle à l’image que nous nous faisons de lui. Quand nous nous plaignons de tout, rejetons tout, pensons du mal des autres ou de l’existence, ils nous rendent la pareille. Quand nous désapprouvons une situation et la condamnons, elle nous condamne en retour en nous obligeant à nous confronter à elle. (L’Église a réprouvé la sexualité et a vu ses prêtres accusés de pédophilie ; le père qui maudit la prostitution verra sa fille se prostituer.) Nous détestons quelqu’un et le tuons, tôt ou tard nous perdons un bien précieux : notre femme, nos enfants, notre maison, notre chat, notre santé ou notre fortune !

Tous les « non » opérés en vertu de la morale et de l’autocensure représentent une tentative de contrôle sur nous-mêmes, la condamnation de nos désirs ou aspirations, le rejet de ce qui peut être bon pour nous. C’est ce qui explique que les passions non vécues se transforment en contre-passions et les fantasmes sexuels refoulés en perversion.

Le oui c’est l’appui, l’accueil, l’approbation. C’est l’acte pur de l’origine. Sans le oui, il n’y a rien. Il faut nous dire oui, même quand ça va mal, pour mettre un terme aux pensées négatives qui gisent en nous et qui sont susceptibles d’assombrir notre réalité. Plus nous nous disons oui, moins il y a de non dans notre existence.

Dire oui au bonheur, à la vie, à la joie, à la fête, à la santé, à la prospérité ; dire oui à l’aventure, à la nouveauté, à ce qui nous attire et nous plaît, à ce qui nous convient ; dire oui à nos ennemis, à nos détracteurs, à nos tyrans, à ceux qui tentent de nous ridiculiser ou de nous banaliser, car ce sera grâce à eux bien souvent que nous en arriverons à nous surpasser, « le mal étant le fumier dont le bien a besoin pour devenir le mieux », comme nous le rappellerait notre philosophe André Moreau. En outre, quoi de mieux que d’approuver nos détracteurs puisqu’ils représentent des aspects de nous-mêmes objectivés !

Mais attention ici : il ne s’agit pas d’accepter une condition difficile ou désagréable, ce qui s’apparenterait à de la résignation et au sentiment d’en être la victime, mais plutôt de faire preuve d’autorité sur la situation en l’approuvant. Dire « oui » au mal (à nos maladies, à nos épreuves, à nos difficultés, à nos tyrans) en nous en servant pour nous avantager. En arriver à faire de notre ennemi un allié, un collaborateur, en l’utilisant consciemment pour devenir plus fort, plus souple, plus avisé, plus intelligent ; se servir de nos faiblesses, de nos maladies ou de nos handicaps en les exploitant pour créer, pour nous inventer à neuf chaque jour, pour nous illimiter.

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